Debbie Harry
Biographie détaillée, par Mélissa Chemam
Jeunesse
Née le 1er juillet 1945 à Miami, en Floride, sous le nom d’Angela Trimble, la petite est adoptée à l'âge de trois mois par Catherine et Richard Smith Harry, propriétaires d'une boutique de cadeaux à Hawthorne, dans le New Jersey, et devient alors Deborah Ann Harry. Elle grandit donc dans le New Jersey, et suit des études à la Hawthorne High School et au Centenary College.
Selon la critique de son livre par Le Figaro, elle est “élevée en petite fille modèle, conditionnée à trouver un mari et à s'épanouir dans une vie sans aspérité, elle se met pourtant à rêver d'ailleurs à l’adolescence."
Le journal ajoute qu’elle s’écarte vite de ce modèle cependant : “Fascinée par l'aura de Marilyn Monroe, elle construit son identité à rebours des conventions sociales de l'époque, se teignant les cheveux en blond platine et dévalisant les friperies new-yorkaises. Une influence qui la suivra tout au long de sa carrière.”
« Je sentais bien qu'elle jouait un personnage », écrit Debbie Harry. « Celui de la blonde légendaire avec une voix de petite fille et un corps plantureux, et que ce rôle dissimulait une grande intelligence ».
Elle s'installe à New York à la fin des années 1960. Elle a à peine plus de 20 ans. Elle travaille pendant un an comme secrétaire au bureau new-yorkais de la BBC Radio, ainsi que comme serveuse au Max's Kansas City et dans un Dunkin' Donuts, comme danseuse à Union City dans le New Jersey, et comme Playboy Bunny.
Début dans la musique
Debbie Harry commence sa carrière en chantant dans le groupe folk The Wind in the Willows puis rejoint le trio féminin The Stilettos, au début des années 1970.
Parmi les musiciens d'accompagnement figure son compagnon, le guitariste Chris Stein. Il a rejoint The Stilettos en tant que guitariste en 1973. C’est avec lui qu’elle va former autour de 1974 le groupe Blondie, dont le nom viendrait des sifflets des hommes sur le passage de la jeune femme…
Blondie
En 1975, Chris et Debbie forment le groupe avec le bassiste Fred Smith (qui rejoindra ensuite Television), puis le batteur Clem Burke, le claviériste Jimmy Destri et le bassiste Gary Valentine. Initialement appelé Angel and the snake, le groupe est renommé Blondie à la fin 1975. Le nom vient des chauffeurs de camions qui interpellaient Debbie Harry : “Hey Blondie”.
Blondie se produit de manière régulière au Max's Kansas City et au CBGB's, deux clubs underground créatifs de New York.
Scène underground
Le groupe prend alors part à la scène punk new-yorkaise en gestation, même si leur musique est plus proche de la pop. Avec les groupe Television et les Ramones, ils sont l’un des premiers à se produire sur la scène du CBGB, ou au Max's Kansas City, où Debbie est aussi serveuse.
Patti Smith est aussi présente à New York ces années-là, comme l’une des rares chanteuses punk, et se montre parfois un peu hostile à Debbie.
Pionnier de cette scène underground des années 1970, le groupe se fait connaître pour son mélange électrique de styles musicaux intégrant des éléments disco, pop, rap, reggae tout en conservant une base new wave.
Premiers albums
Blondie obtient son premier contrat avec Private Stock Records au début de l'année 1976 et sort son premier single X-Offender le 17 juin 1976. Leur premier album est sobrement intitulé Blondie, et sort en décembre 1976. Le groupe est alors choisi par David Bowie et Iggy Pop pour faire la première partie de leurs tournées américaines.
Le premier succès commercial du groupe arrive en Australie en 1977, grâce à la vidéo de ‘In the Flesh’, face B du single X-Offender. Burke, le batteur, explique ce succès en disant que cette chanson est « un précurseur de la ballade ».
En 1977, Frank Infante remplace Gary Valentine ; il passera ensuite à la guitare après l'arrivée en 1978 de Nigel Harrison à la basse.
En février 1978, Blondie sort son deuxième album, Plastic Letters. L'album est enregistré sans Gary Valentine, qui a quitté le groupe. Le premier single est ‘Denis’, une reprise de 1963 du groupe Randy and the Rainbows. Le single atteint la seconde place des classements britanniques.
Une tournée suit au Royaume-Uni, un succès. Avec Nigel Harrison (guitare, basse), le groupe devient un ensemble de six membres.
Succès planétaire
Le succès commercial international vient à la fin des années 1970 et au début des années 1980, en particulier avec les chansons ‘Heart of Glass’ (1978) et ‘Call Me’ (1980). Tout commence avec leur troisième album, Parallel Lines, produit par Mike Chapman, deviendra leur plus grand succès avec 20 millions d'albums vendus dans le monde.
Le premier single de l'album est ‘Picture This’ (no 12 au Royaume-Uni), le deuxième est ‘Hanging on the Telephone' (no 5 au Royaume-Uni). Mais c'est avec le troisième single, ‘Heart of Glass’ que le groupe connaître un véritable succès mondial. Le titre se hisse en tête des classements américains en avril 1979. La chanson est accompagnée d'un clip vidéo qui met en vedette Debbie Harry et lui procure un statut de célébrité : https://www.youtube.com/watch?v=WGU_4-5RaxU
Les singles suivants sont :
aux États-Unis le titre ‘One Way or Another’ ;
au Royaume-Uni ‘Sunday Girl’, qui devient no 1 des classements britanniques.
Parallel Lines est classé 140e dans le classement du magazine Rolling Stone des 500 plus grands albums de tous les temps.
Leur quatrième album, Eat to the Beat, paraît en octobre 1979. Il est bien accueilli par la critique et les singles ‘Atomic’, ‘Dreaming’ et ‘Union City Blue’ deviennent également des succès.
Le single suivant de Blondie, ‘Call Me’ est le fruit d'une collaboration de Debbie Harry avec l'auteur-compositeur et producteur italien Giorgio Moroder, à l'origine des plus grands succès de la chanteuse afro-américaine disco Donna Summer. ‘Call Me’ ne figure pas sur un album studio du groupe, mais est le thème principal de la bande originale du film American Gigolo. Le single sort en février 1980 et est devenu un énorme hit dans le monde entier.
En novembre 1980, Blondie sort un cinquième album studio, Autoamerican. Il contient les deux hits ‘The Tide Is High’, une reprise d'une chanson de 1967 du groupe The Paragons, et ‘Rapture' qui a été la première chanson contenant du rap à se hisser en haut des classements, un rap chanté par Debbie elle-même. Dans le clip vidéo accompagnant la chanson, elle l’interprète entourée de danseurs, et d’artistes graffiti comme Fab Five Freddy, Lee Quiñones and Jean-Michel Basquiat : https://www.youtube.com/watch?v=pHCdS7O248g
Elle reste très amie avec Jean-Michel Basquiat, et lui achète contre 300 dollars sa toile ‘Self Portrait with Suzanne’.
Pause, reformation, séparation
Après leur succès de 1978-1980, Blondie fait une pause. Debbie Harry et Jimmy Destri sortent alors chacun un album solo.
L’album KooKoo de Debbie Harry sort en 1981, produit par Nile Rodgers et Bernard Edwards de Chic.
Le groupe se retrouve en 1981 pour enregistrer et sortir l'année suivante The Hunter, qui sort en 1982. Contrairement aux précédents, l’album est mal reçu, et les deux singles de l'album (‘Island of Lost Souls’ et ‘War Child’) des succès modéré. ‘War Child’ se classe 39e des classements britanniques.
Des tensions naissent alors au sein du groupe, notamment en raison du déclin commercial et de la focalisation de la presse sur Debbie Harry, les autres membres du groupe étant ignorés. La rupture est proche lorsque Chris Stein apprend qu'il est atteint de la maladie pemphigus qui peut être mortelle.
Leur manager disparaît et la situation financière du groupe devient critique. Les tensions entre les membres s'aggravent encore plus, ainsi que la maladie de Stein. Blondie annule sa tournée et annonce finalement sa rupture en août 1982.
Chris et Debbie restent ensemble. Debbie doit vendre sa maison pour rembourser les dettes accumulées par le groupe. Elle décide finalement quelque temps plus tard de mettre fin à sa relation avec Chris Stein. Mais c’est toujours avec lui que Debbie relancera sa carrière solo en 1986 avec l'album Rockbird.
Pendant ce temps, Burke devient batteur de session à la demande en jouant un temps avec le groupe Eurythmics. Jimmy Destri, quant à lui, devient producteur et musicien de studio.
Blondie reste connu largement pour le personnage de Debbie, son charme sur scène, et ses performances vocales, ainsi que pour leur variété de styles, allant de la musique pop au punk tout en embrassant le disco, la new wave et le hip-hop.
Carrière solo
Debbie Harry continue sa carrière dans la musique en solo avec plus ou moins de succès. Elle s’occupe aussi de Chris Stein, toujours malade…Quelques singles paraissent avec succès en 1983.
Elle joue comme actrice au cinéma, notamment dans leading role in Videodrome (1983) de David Cronenberg, et reste dans l'œil du public.
En 1987, elle se sépare de Chris Stein ; ils restent très bons amis. En 1986, Harry sort son second album solo, Rockbird (no. 97 aux US, No. 31 au UK).En 1989, l’album Def, Dumb and Blonde.
Elle poursuit sa carrière d’actrice, et chante en collaboration avec d’autres groupes, dont les Talking Heads. Elle inspire aussi de nombreuses chanteuses, de Madonna à Gwen Stefani. En 1990, Debbie réunit Stein et Burke pour une tournée d’été. Elle continue le cinéma.
Reformation de Blondie
En 1996, Chris Stein et Debbie Harry reprennent contact avec les anciens membres de Blondie : Burke, Destri et Valentine. Ils veulent se reformer sous le nom Blondie. Cependant Nigel Harrison et Franck Infante ne participent pas à la réunion et tentent de poursuivre le groupe pour l'empêcher de reprendre leur nom, en vain.
En 1997, le groupe est reformé, après 15 ans de séparation. Une tournée internationale est organisée à la fin 1998 et début 19992 avec Deborah Harry, Chris Stein, Clem Burke, et Jimmy Destri.
Un nouvel album, No Exit, est publié en février 1999, et est décrit par Jimmy Destri comme « 15 chansons à propos de rien ». Le groupe retrouve le succès avec un single, ‘Maria’, qui devient numéro 1 au Royaume-Uni en 1999, exactement vingt ans après le tube ‘Heart of Glass’.
Le groupe est maintenant un quatuor composé de Debbie Harry, Chris Stein, Clem Burke et Jimmy Destri. Gary Valentine n'a pas joué sur l'album mais a coécrit deux chansons.
Il effectue des tournées à travers le monde durant les années suivantes. Ils sortent ensuite l'album The Curse of Blondie en octobre 2003, avec le single très dansant ‘Good Boys’.
En 2004, Jimmy Destri prend sa retraite, laissant Harry, Stein et Burke.
À nouveau solo
En 2006, Debbie Harry commence à travailler à New York City à son 5e album solo, Necessary Evil (qui sort 2007). Avec les producteurs Super Buddha (qui ont remix” le titre de Blondie ‘In the Flesh’ en 2005). Il contient le titre ‘Dirty and Deep’.
Tout au long de l’année 2006, plusieurs titres paraissent sur sa page Myspace, don’t ‘Charm Alarm’, ‘Deep End’, ‘Love with a Vengeance’, ‘School for Scandal’, ‘Necessary Evil’, ‘God Save New York’, ‘New York Groove’, ‘Two Times Blue’.
En juin 2007, une version téléchargeable de ‘Two Times Blue’ apparait sur son site official.
Et son 5e album, Necessary Evil , paraît aussi en 2007.
Blondie toujours
Le 5 juin 2008, Blondie commence une tournée mondiale pour célébrer les trente ans de son mythique album Parallel Lines avec des concerts américains, puis, à partir de juillet, des concerts en Israël, au Royaume-Uni, en Russie, en Scandinavie et d'autres pays d’Europe.
Un nouvel album de Blondie paraît encore en 2011 sous le titre de ‘Panic of Girls’.
Le 12 mai 2014, Blondie fête ses 40 ans de carrière en sortant le coffret Blondie 4(0) Ever , un double album composé de ses classiques ré-enregistrés et d’un nouvel opus baptisé Ghosts of Download. Ce disque accueille notamment la chanteuse américaine Beth Ditto, du groupe Gossip.
Sa sortie s'accompagne d'une nouvelle tournée.
En 2017, le groupe sort un onzième album studio intitulé ‘Pollinator’.
Mémoires et télévision
En octobre 2019, Harry publie ses mémoires, intitulés Face It, avec Dey Street Books.
Elle y raconte le pire et le meilleur de sa carrière - disques d'or, faillite, agression sexuelle, dépendance à l'héroïne, rançon de la gloire… Elle étoffe l'expérience avec des photographies, et des illustrations.
Le livre paraît en français en 2020 : https://www.fnac.com/a15006326/Debbie-Harry-Face-it-l-autobiographie
In 2020, Harry elle apparaît dans la series High Fidelity.
En 2023, Rolling Stone liste Debbie Harry à la 168e place sur sa liste des 200 Plus Grands Chanteurs de tous les temps.
À lire, à voir :
Son livre
Face It, Dey Street Books, 2019 (USA)
Face it, l’autobiographie, 2020 (France)
https://www.harpercollins.fr/products/face-it-lautobiographie-1
Chronique dans Le Figaro
https://www.lefigaro.fr/culture/debbie-harry-l-iconique-chanteuse-de-blondie-regarde-son-passe-dans-face-it-20201020
Pudique, “c'est donc avec une certaine retenue qu'elle aborde son addiction à l'héroïne, sa longue histoire avec Chris Stein, les agressions qu'elle a subies ou les moments de doutes et de galères qui ont jalonné son parcours musical.”
Citations
J’étais « une poupée gonflable, mais avec côté sombre, provocateur et agressif. Je la jouais, mais j'étais néanmoins très sérieuse ».
« Il est plus transgressif pour les filles de s’habiller en femme qu’en garçon ».
« Tout ce qui m'attire, tout ce à quoi j'ai toujours voulu ressembler est à New York ».
« Etre en haut de l’affiche n’est jamais une position figée. C’est une bataille constante. »
Un entretien écrit
Avec Paris Match, 2020
https://www.parismatch.com/Culture/Musique/Debbie-Harry-il-etait-une-fois-Blondie-1711730
« Je prenais de la drogue pour tenir, pas pour faire la fête. C’était un moyen de me destresser, d’oublier les problèmes. »
D’un cambriolage qui a tourné au viol, elle raconte : « Je ne voulais pas être une victime. Je n’ai pas porté plainte… Deux facteurs m’ont aidée à survivre : Chris a été extraordinaire, gentil et compréhensif. Et même si c’était effrayant, je n’ai pas été battue. »
« Tout révéler n’est pas nécessaire. Je souhaitais décrire au plus près mes ressentiments. Ecrire m’a permis de clore des chapitres, de ne plus ruminer certaines histoires. C’était parfois pénible ».
Un entretien filmé
Avec Thierry Ardisson en 2003
https://www.facebook.com/watch/?v=1003999983852246
Écoutez l’épisode
Debbie Harry a été présentée par notre invitée Rebecca Manzoni dans l’épisode 11 du podcast.